t'as l'droit de recevoir des visites, désormais.
t'as passé l'étape sevrage, celle qui fait mal au coeur et au corps. celle qui dure vingt-et-un jour, en règle générale. le temps pour toi d'évacuer toutes les toxines et toutes les cochonneries et de ressentir le manque. manque inévitablement accompagné de sueurs nocturnes, de tremblements et de malaises. t'avais été suivi, tout au long du processus.
on t'avait apporté toute l'aide nécessaire pour que jamais tu n'aies le sentiment d'être laissé pour compte, abandonné ou même marginalisé. ici, tu te sentais bien, pour la première fois depuis longtemps. t'avais réappris à vivre tout en te sentant perpétuellement entouré par des professionnels qui n'avaient jamais baissé les bras face à tes sautes d'humeur conséquentes. voilà déjà plus de deux mois que tu vis ici, dans cette clinique. c'est soane qui t'a convaincu, soane aussi qui t'a accompagné. à moins de deux heures de la ville, tu réapprends à marcher comme si t'avais déjà tout oublié.
aujourd'hui, pourtant, tu te sens le coeur assez lourd.
t'avais écrit à jo sans trop savoir quelle serait sa réaction. quand elle avait proposé de venir te voir, t'avais senti que quelque chose se débloquait en toi. tu lui en avais voulu, tu l'avais même portée responsable de tout ce qu'il t'était arrivé jusqu'à comprendre, en réalité, que tout ça n'était pas de son ressort. aujourd'hui, elle doit venir. aujourd'hui, tu te répètes alors que t'enfiles ton pull à col roulé. dehors, le temps est froid mais clément. la neige n'est pas encore tombée. les nuages sont sombres pourtant, mais rien n'entache ta bonne humeur. quand on t'fait comprendre qu'elle est arrivée à l'accueil, t'as l'sang qui n'fait qu'un tour. tu t'observes. t'es différent, c'est vrai. t'as repris des couleurs, un peu de masse également. t'es plus souriant, peut-être.
quand tu la vois, à l'accueil, entrain de se tripoter les doigts avec nervosité, ça t'arrache un sourire, sans que tu n'saches vraiment pourquoi. (jo.) tu l'appelles en levant une main. ton regard se fond dans l'sien et t'as l'coeur qui tombe déjà à tes pieds. résiste, tu t'invectives en t'approchant. (t'as fait bonne route ?) tu lui demandes, pour meubler. tu sais même pas si tu dois lui tendre la main ou l'embrasser.

tu ne pouvais pas vraiment dire que la situation te mettait totalement à l'aise. bien au contraire. dans l'accueil de la clinique, tu regardais partout autour de toi. jouant avec tes doigts, avec tes cheveux parfois, tu cherchais à t'occuper en attendant que tessan arrive. tout ça, en te posant des tas de questions. est-ce que tu avais bien fait de venir ? était celle qui revenait le plus souvent dans ton esprit. tu pensais que oui. mais tu avais peur que les choses ne repartent comme lors de vos dernières discussions. encore des disputes. vous n'aviez fait que ça ces derniers temps. par sa faute, puis la tienne. vous ne faisiez que vous renvoyer la balle et vous énerver. il était peut-être temps d'arrêter tout ça. de mettre les choses à plat ? tu crois que c'était ce que tu voulais toi. mais tu savais que tu n'étais pas seule à décider. aujourd'hui, tessan avait pris la décision d'aller vers le mieux. et rien que pour ça, tu savais que tu avais bien fait de venir le voir. parce que tu voulais tout de même lui dire que tu étais fière de ce qu'il fait et que tu espérais que tout cela allait l'aider à aller mieux. finalement, tu le vois, tu l'entends aussi t'appeler, jo. et tu te lèves pour le rejoindre. un mince sourire sur tes lèvres, tu étais pourtant toujours aussi mal à l'aise. c'est tessan.. tu ne devrais pas te mettre dans tous ces états. tu le connais par coeur, pourtant. t'as fait bonne route ? il te demande ensuite et tu affiches un sourire. oui oui. tu commences par dire, tout en continuant de le regarder droit dans les yeux. ça.. ça me fait plaisir de te voir tessan. comment vas-tu ? tu demandes, tu t'inquiètes. tu pouvais bien imaginer que ça ne devait pas être facile pour lui, tout ce qu'il traverse. mais tu ne doutes pas que le jeune homme est assez fort pour s'en sortir.

tu marches sur des oeufs, c'est vrai. dès que tu la vois, tu n'peux pas t'empêcher de repenser à toutes les épreuves que vous avez traversées.. ensemble ou séparément. à votre dernière dispute, à vos nombreuses ruptures, à votre amour - aussi sincère puisse-t-il avoir été - et, fatalement, aux trahisons.
les tiennes, les siennes.
de commune mesure. la drogue pour son mariage. un prêté pour un rendu. tu l'avais fait souffrir, elle t'avait aussi fait souffrir. balle au centre ? tu n'es pas certain que l'expression soit bien choisie mais t'as l'sentiment qu'ici, vous pouvez faire peau neuve et tout recommencer. remettre les compteurs à zéro, en quelque sorte. alors tu t'avances vers elle. mais chaque pas t'entraîne dans ce souvenir délicieux d'une romance inachevée. tes sentiments l'emportent sur la raison, tu l'aimes encore. tu l'aimeras toujours. c'est ta seule certitude. et c'est peut-être l'unique raison qui te pousse à rester ici, à te battre encore pour ta sauvegarde et ta rédemption. (oui oui.) elle glisse ses yeux dans les siens. tu souris à peine. il y a cette bague à son doigt qui te rappelle qu'elle ne t'appartient plus depuis longtemps. ce mariage, finalement, l'arrange peut-être plus qu'elle n'osait le prétendre. ou alors garde-t-elle ce bijou en souvenir d'une bêtise, comme pour se rappeler son erreur ? tu n'as jamais osé lui demander ce qu'elle comptait en faire, après tout. peut-être l'aime-t-elle.  (ça.. ça me fait plaisir de te voir tessan. comment vas-tu ?) tu souris, relèves les yeux et la regardes. (bien, merci.) et puis, tu pointes du regard l'extrémité de l'accueil, là où se trouvent les portes qui conduisent au jardin extérieur. (tu veux bien qu'on aie s'installer sous la pergola. je n'ai toujours pas réussi à me défaire de la nicotine, malheureusement.) tu lances pour plaisanter, pour désamorcer la situation. tu voudrais que ça s'passe bien, mais il existera toujours une ombre au tableau, tu le sais.

vos regards qui se rencontrent. ton coeur qui s'emballe, à tous les coups. parce que c'est tessan. parce qu'il est différent de tous les autres. parce qu'il est sans doute celui qui t'aura le plus fait souffrir sur cette terre, mais également celui que tu auras le plus aimé. et que tu aimes encore. sans le moindre doute. ça se sent alors que ton coeur palpite, que tes joues rosissent un petit peu quand il se retrouve plus proche de toi. la bouche sèche, t'arrive tout juste à articuler quelques petits mots. heureuse de le voir, c'était un fait indéniable. tu espérais, dans le fond, que ce soit aussi son cas. vous avez merdé. à bien des égards. autant l'un que l'autre, sans le moindre doute. votre histoire n'était qu'une succession de drames et de problèmes. cela voulait-il dire qu'elle n'avait plus aucun avenir pour autant ? difficile à dire à ce stade. tu étais toujours mariée à un autre, pour l'heure. ce qui ne devait pas l'enchanter, tu le sais bien. tu espérais pourtant que les choses rentrent dans l'ordre le plus rapidement possible. bien, merci. il commence par te répondre avant de montrer du regard l'extérieur, tu veux bien qu'on aie s'installer sous la pergola. je n'ai toujours pas réussi à me défaire de la nicotine, malheureusement. tu hoches doucement la tête, mince sourire sur tes lèvres. oui bien sûr, allons-y. tu souffles doucement et vous partez en silence en direction de la pergola. t'attends que vous soyez dehors pour finalement t'installer sur une chaise et plonger ton regard sur le sien. comment c'est ici ? ça te fait du bien ? tu ne sais pas vraiment aborder le sujet. tu t'y prends sans doute mal. comme dans toutes les discussions que vous avez tous les deux. vous vous connaissez sans doute par coeur et pourtant vous êtes totalement incapable d'avoir une discussion sans froisser l'autre à un moment donné.

il suffit d'un seul contact, d'un seul regard, pour comprendre que tu l'as toujours dans la peau. putain comme je l'aime, ça gronde partout en toi et ça fait trembler chaque pore de ton épiderme jusqu'à faire secouer ton myocarde. tu résistes à l'envie violente de lui dire tout ce que tu penses de l'alliance à son annulaire et de ce mariage dont vous aviez déjà parlé pour te concentrer sur ses yeux. ça t'apaise, comme ça l'a toujours fait. Jo est la seule partie de ton passé dont tu n'regrettes rien sinon la manière dont tout s'est terminé. t'aurais voulu être à la hauteur de la femme qu'elle a toujours été. et la revoir réveille forcément de douloureuses sensations jusque dans ton bas-ventre. le désir, l'envie mais également l'amour et les sentiments. pour détourner la conversation, tu lui proposes de prendre un peu l'air. t'as l'sentiment d'étouffer ici malgré la largeur de la pièce.
- oui bien sûr, allons-y. elle accepte avant de te suivre. son parfum enivre tes sens jusqu'à te faire oublier ton prénom. tu retiens le léger sanglot qui se crève sur tes lèvres quand tu vous visualises dans un passé si proche.. je n'ai jamais su l'oublier et tu n'le sauras jamais vraiment. tu t'installes sous la pergola, remontant ton pull contre ton menton. les températures sont basses, ici aussi, mais sa présence te réchauffe. comment c'est ici ? ça te fait du bien ? elle marche sur des oeufs, elle ne sait pas trop comment se comporter et tu dois bien reconnaître que sur ce point, vous êtes à égalité. mais vous vous connaissez trop pour ignorer ce qu'il se passe quand vos iris se mettent à danser ensemble. tu sais qu'elle t'aime encore, c'est inscrit partout sur son visage. de ses orbes à ses lèvres pleines. tu allumes une cigarette, la portes à tes lèvres pour gagner du temps, en tire une bouffée avant d'exalter la fumée entre tes lèvres en relevant légèrement la tête.
- le cadre est idéal pour apprendre à gérer l'angoisse liée au manque. tu plantes tes yeux dans les siens et puis, du bout du doigt, tu lui montres un peu l'espace tout autour de vous. le jardin est mis à disposition de chacun pour profiter de l'air frais de Montréal, il y a quelques salles de sports pour nous permettre également de nous changer les idées, une grande bibliothèque et un espace bien-être au sous-sol. tu souris, légèrement en tirant une nouvelle taffe. à bien des égards, on a plus l'impression d'être au Club Med qu'en cure de désintox'. mais ça fait ces preuves, j'ai l'impression d'aller nettement mieux. comme pour la rassurer sur ton état, tu clignes de l'oeil, l'invitant sans doute à te poser toutes les questions qu'elle doit encore avoir en réserve.

t'essayes de te détendre un petit peu. sous la pergola, tu le regardes droit dans les yeux et tu tentes de poser des questions. t'es pas certaine de ce que tu peux demander ou non. t'as peur aussi de trop parler et de vous amener sur les sujets qui fâchent. comme souvent entre vous deux, ça risquait de se terminer par une petite dispute et tu ne voulais clairement pas déclencher tout cela. tu cherchais déjà à savoir si ça lui faisait du bien d'être ici. dans le fond, tu n'en doutais pas. ça se lisait déjà sur son visage. il avait le regard beaucoup plus illuminé que d'habitude, il avait aussi repris quelques couleurs. non, tu ne doutais pas un seul instant que tessan devait aller mieux et c'était évidemment tout ce que tu lui souhaitais. le cadre est idéal pour apprendre à gérer l'angoisse liée au manque. le jardin est mis à disposition de chacun pour profiter de l'air frais de Montréal, il y a quelques salles de sports pour nous permettre également de nous changer les idées, une grande bibliothèque et un espace bien-être au sous-sol. à bien des égards, on a plus l'impression d'être au Club Med qu'en cure de désintox'. mais ça fait ces preuves, j'ai l'impression d'aller nettement mieux. tu souris légèrement en l'écoutant parler. tu veux bien croire que ce n'est pas non plus le paradis, mais ça a l'air tout de même pas si mal, de ce qu'il te raconte en tout cas. j'ai l'impression aussi que tu vas nettement mieux. tu as vraiment meilleure mine. tu commentes doucement en continuant de le regarder. et ça va durer encore combien de temps ? tu sais qu'il faut laisser le temps au temps. mais d'une certaine manière tu as envie de le voir sortir assez rapidement de tout cela. t'as envie de le retrouver, comme avant.

tu fais d'ton mieux pour rester calme, stoïque. ne surtout pas déraper. tu sais que lorsqu'il s'agit de vous, le moindre geste ou le moindre mot peut faire démarrer un violent feu. tu refuses de céder à la tentation de lui faire, une nouvelle fois, des reproches même si t'as l'sentiment, parfois, que c'est en partie d'sa faute si tu te retrouves ici. accusant le coup du mieux que tu peux, tu la regardes, et tu mesures tes propos. elle esquisse un léger sourire, ça réchauffe un peu ton corps sans que tu n'saches vraiment comment l'expliquer.
- j'ai l'impression aussi que tu vas nettement mieux. tu as vraiment meilleure mine. Soane avait tenu les mêmes propos à ton encontre. en règle générale, tu crois que cette cure te fait du bien. t'as l'impression de changer, pour la première fois d'ta vie. c'est une réussite, pour toi tout du moins. et ça va durer encore combien de temps ? elle pose la question sans que tu t'y attendes. est-ce qu'elle est pressée de te retrouver à l'extérieur ? pourquoi ? elle est mariée, non ? tu arques un sourcil, posant tes coudes sur la table entre vous.
- le temps qu'il faudra pour qu'ils me jugent apte à affronter un quotidien sans céder à la tentation. tu expliques, brièvement. t'as pas envie d'épiloguer non plus des heures sur cette incapacité dont tu sais faire preuve lorsqu'il s'agit de résister. t'as peur qu'une fois livré à toi-même, dehors, tu n'sois plus capable de rester clean. et tu sais exactement pourquoi. je ne t'apprends rien Jo, mais notre histoire a été le catalyseur de mes dépendances. sans pour autant tout te mettre sur le dos, il m'est difficile de nier l'effet que tu provoques chez moi. malgré tous les efforts que je fais ici pour m'en sortir, c'est parce que je suis loin de toi que je tiens bon. j'ai peur qu'une fois de retour à Trois-Rivières.. tu marques une pause, le regard qui s'éloigne. tu ravales ta salive, difficilement. le fait que tu sois mariée.. tu n'aimes même pas dire ces mots. ça devrait pas être vrai. tes orbes cherchent à nouveau les siennes. tu esquisses un sourire du mieux que tu l'peux. j'ai peur que ça n'complique les choses pour moi. la vérité blesse, sans doute. mais nier ne servirait à rien.

le compte à rebours est lancé. comme à chaque fois. tu attends le mot de travers. celui qui le fera sortir de ses gonds, ou ce sera toi. t'en sais rien. mais il y a forcément un moment où ça va merder. parce que vos dernières discussions ont toujours été comme ça, jo. vous avez jamais été capable de parler sans que le ton ne finisse par monter, sans que les reproches ne fusent d'un côté comme de l'autre. tu te demandes parfois pourquoi tu l'aimes encore autant au fond de toi. comment est-ce possible alors que d'un autre côté tu as besoin de lui faire des reproches sur tellement de choses. votre histoire est sans doute entrain de se terminer à petit feu. bientôt, vous ne serez plus capable de vous supporter, à force de vous faire des reproches. bientôt, vous déciderez de vous tourner le dos, définitivement. c'est pas ce que tu souhaites. c'est peut-être ce que lui attend. pour le moment, tu cherches déjà à savoir combien de temps il va rester ici. le temps qu'il faudra pour qu'ils me jugent apte à affronter un quotidien sans céder à la tentation. tu hoches doucement la tête, alors que lui poursuit déjà, je ne t'apprends rien jo, mais notre histoire a été le catalyseur de mes dépendances. sans pour autant tout te mettre sur le dos, il m'est difficile de nier l'effet que tu provoques chez moi. malgré tous les efforts que je fais ici pour m'en sortir, c'est parce que je suis loin de toi que je tiens bon. j'ai peur qu'une fois de retour à trois-rivières.. le fait que tu sois mariée.. j'ai peur que ça n'complique les choses pour moi. les mots font mal. oui. t'accuses le coup, difficilement. ton regard qui le fuit immédiatement. tu sais pas si t'as envie de t'énerver, de pleurer ou juste de partir. il te remet toute la faute dessus. t'aurais jamais dû venir, finalement, hein ? je ne suis bientôt plus mariée, je te l'ai déjà dit, c'est.. c'est pas un mariage, c'est rien du tout.. c'est.. tu t'arrêtes. est-ce que c'est vraiment encore nécessaire que tu te justifies sur tout ça ? tessan ne t'écoute pas, depuis le début. surtout, il ne veut plus de toi dans ta vie. tu te lèves. je n'aurais pas dû venir te voir. t'as raison, tu t'en sortiras sans doute mieux sans moi dans sa vie. tu souffles doucement. ça te fait mal de le dire, mais c'est peut-être la vérité ? peut-être que c'est bien la fin de votre histoire. il est temps d'avancer, sur des chemins différents.