t'es assis derrière ton bureau. l'cliché voudrait sans doute que tu t'allumes un cigare en attendant qu'il se pointe mais t'as jamais été porté sur ce genre de trucs. t'as vidé ton paquet de clopes ce matin, nerveux au possible. le corps de cora davies a été retrouvé sur la propriété de charles poulin et, malgré tout ce qu'il s'est déjà dit ou ce qu'il peut se dire, t'es persuadé qu'il y est pour quelque chose.
avant de l'inquiéter par message, t'avais pris le temps d'ouvrir le dossier. ton chef avait décidé de te laisser l'affaire puisqu'elle se rapprochait étrangement des meurtres d'inès poirier et de callie lussier. t'avais mis du temps à comprendre ce qui rapprochait la jeune cora aux trois familles. et puis, l'évidence avait frappé, bien sûr. mais t'avais rien dit, pour l'heure. tu préférais voir charles en personne et avoir sa version des faits.
(agent farbes, m. poulin est à l'accueil.) la petite blonde de l'accueil venait de te tirer de tes pensées. le coeur un peu serré, tu te lèves, réajustes ton uniforme et ranges légèrement ton bureau. tu ouvres la porte et le retrouves à l'entrée. tu lui adresses un sourire poli. (monsieur poulin, si vous voulez bien me suivre.) tu te montres courtois, gentil. t'es pas du genre à agresser les gens, malgré tes certitudes. quand il s'assied en face de toi, tu lui proposes même (avant de commencer, est-ce que vous désirez boire un café ?) t'es pas dupe, tu sais comment fonctionnent ces hommes. ils ont du pouvoir, ils ont besoin d'en avoir. tu vas pas être dans ses petits papiers si tu témoignes pas du respect qu'il mérite.

les gouttes de sueur perlent sur son front, il sent les palpitations de son coeur dans ses tempes et ses mains sont crispées si fort sur le volant de sa nouvelle lamborghini qu'elles sont toutes blanches tellement elles manquent de circulation sanguine. planté devant le poste de police depuis une bonne vingtaine de minutes, charles essaie de se calmer. il sent que la soupe est très chaude.  

ils savent.

il était surpris d'être encore libre, puisque l'arrestation de veronica avait eu lieu il y a plusieurs semaines déjà. ils devaient maintenant avoir amassé assez de preuves pour l'accuser. il avait peur de ne jamais ressortir du poste de police et de finir ses jours en prison. mais s'ils avaient réellement eu assez de preuves, les flics n'auraient pas attendu tout ce temps et seraient venus l'arrêter directement chez lui.

ils savent tout.

sa paranoïa commençait à se faire de plus en plus intense. les mains tremblantes, il ouvre la portière et se dirige vers le poste de police. en chemin, il essuie ses mains moites plusieurs fois sur son pantalon. "bonjour, je viens voir le sergent farbes." la dame à l'accueil fait un court appel et quelques instants plus tard, charles se retrouve devant une porte qui portait l'inscription ali farbes. en chemin, charles était resté silencieux. il avait de la difficulté à déglutir. la porte s'ouvre sur un flic à l'air sérieux qui l'invite à s'assoir. charles doit surtout rester le plus impassible possible afin que la culpabilité et la détresse ne se lisent pas sur son visage. quand ali lui propose un café, charles refuse poliment. "je prendrais plutôt un verre d'eau." charles est assez stressé comme ça, le café lui donnerait encore plus mal au ventre. mais, ce verre d'eau pourrait lui servir de distraction afin de garder un air passif.

lorsque vous avez arrêtez Véronica Lussier et que vous l'avez inculpée pour le meurtre d'Inès Poirier.. cette dernière avait négocié des conditions qui, à l'époque, te paraissaient superflues mais qui, aujourd'hui, prenaient tout leur sens. néanmoins, face aux éléments évidents de l'enquête ouverte sur la mort de cette jeune femme, tu ne pouvais pas faire autrement qu'inviter Charles Poulin à venir te rencontrer, ici. bien sûr, ça n'avait rien d'informel, pour se faire, t'avais dû prévenir ton responsable et mettre tout en oeuvre pour que l'interrogatoire se passe de la manière la plus standard possible. t'avais balayé tes aprioris, aussi. Véronica, dans un dernier geste, avait tout fait pour protéger cet homme. aussi t'apparaissait-il aujourd'hui plus coupable qu'il ne l'avait jamais été. aucun lien cependant n'avait été fait entre lui et cette jeune femme qui, jusqu'à hier, était encore inconnue de vos services. l'ADN prélevé dans ses cheveux avait permis à la police scientifique de vous donner son identité, mais rien de plus. et t'étais loin de te douter de la réalité qui se cachait derrière tout ça. alors quand tu le vois s'installer devant toi, tu remarques très vite la couleur pâle de sa peau et le langage de son corps. il est tendu, nerveux. et, tout de suite, tu comprends qu'il cache quelque chose, mais quoi ? le problème, c'est que tu ne peux pas violer les termes de l'accord passé par Véronica, même s'il ne s'agit plus de la même enquête. tu dois donc agir adroitement pour obtenir de lui ce que tu cherches sans avoir l'air de l'accuser.
- je prendrais plutôt un verre d'eau. tu fais signe de tête à la réceptionniste qui l'a conduit jusqu'ici et elle revient, à peine un peu plus tard, avec le verre en question. de ton côté, tu t'es levé, t'as attrapé un dossier et, gentiment, tu viens l'ouvrir devant lui. entre vous, sur la table, tu exposes des clichés de Cora Davies, allongée dans la terre, morte. tu lèves tes yeux vers Charles.
- connaissez-vous cette femme M. Poulin ? tu commences doucement, sans trop y mettre les formes. tu poses une simple question, t'en gardes d'autres en réserves. tu sais qu'il n'est pas ici par hasard, reste plus qu'à assembler les pièces du puzzle.