tu traînes ta carcasse jusqu'à la porte, tu frappes.
tu sais même pas comment t'as eu l'courage d'arriver jusque là, ni comment t'as fait pour rester en vie. il s'est passé trop d'choses, il t'est arrivé trop d'emmerdes ces dernières semaines et ton coeur est en miettes. complètement ravagé par ta rencontre impromptue avec leah. t'es brisé, c'est vrai. ça s'lit dans tes traits fatigués et tirés. t'as même pas la force de faire semblant. toi, le roc, celui qui, pourtant, surmontait presque tout autrefois. tu es à bout de souffle, à bout de nerfs. tu te révoltes contre l'injustice et, surtout, tu te révoltes contre cette vie qui n'fait qu'aplatir ton corps chaque jour un peu plus.
tu frappes.
mais l'envie n'y est pas, l'envie n'y est plus. quand elle ouvre la porte, tu lui adresses un léger sourire. elle est surprise, forcément. tu dis (je t'avais dit que je reviendrai.) avant d'entrer, finalement. t'as les mains dans les poches, t'attends qu'elle referme derrière toi. tu n'sais pas ce qu'elle faisait, ni même si tu la déranges. tu sais simplement que t'es là pour lui parler, pour lui expliquer ton histoire.. encore. t'as l'moral à plat pourtant, t'as plus d'batterie, t'as même plus d'envies. tu plonges tes yeux dans les siens (je vais tout te raconter, mais avant, j'aimerais beaucoup qu'on s'vide une bouteille s'il te plait. comme au bon vieux temps.) dans un espoir réciproque d'complicité et de regain d'énergie. parce qu'elle te manque, la confidente, la grande soeur. parce que tu n'supportes plus c'que t'es devenu et encore moins ce qu'il te reste à faire. tu souffles, fatigué.

t'avais pour une fois rien de prévu. juste l'envie de prendre un petit peu de temps pour toi. il faut dire que tu n'en avais pas beaucoup ces derniers temps puisque tu étais sans arrêt occupée par ton travail. il était donc clairement important que tu te trouves des petits moments comme celui-ci pour te reposer pleinement. tu avais pris le temps de faire un peu d'ordre dans ton appartement, c'était clairement nécessaire depuis le temps. tu t'étais ensuite confortablement installée sur ton canapé pour te regarder une petite série. ça faisait bien trop longtemps que tu n'avais plus pu le faire. t'étais bien installée avec une couverture lorsque tu entends sonner à ta porte. tu n'attendais pas la moindre visite. tu ouvres donc la porte avec les sourcils froncés et t'es surprise de voir ange. tu ne l'avais plus revu depuis ce jour où tu avais découvert qu'il était en vie. il t'avait promis de venir te voir, de te raconter les détails de son histoire pour que tu puisses comprendre ce qu'il s'était véritablement passé. je t'avais dit que je reviendrai. un mince sourire s'étire sur tes lèvres. bien sûr que ça te faisait plaisir de le revoir. ça te semblait toujours autant fou que ton frère soit en vie. et en même temps tu n'avais pas vraiment pu profiter de son retour encore. tu ne pouvais pas vraiment le voir ni crier sur tous les toits que ton frère est en vie. c'était compliqué.. tu t'écartes sans un mot pour le laisser entrer dans ton appartement et tu fermes la porte derrière elle. je vais tout te raconter, mais avant, j'aimerais beaucoup qu'on s'vide une bouteille s'il te plait. comme au bon vieux temps. tu affiches un sourire en coin. bien sûr, je vais nous chercher ça. tu affirmes finalement en le laissant s'installer sur ton canapé. tu filais chercher une bouteille et deux verres que tu ramenais rapidement au salon pour faire le service. je suis contente que tu sois revenu. tu souffles doucement en lui tendant son verre de vin.

oui, tu reviens. tu n'peux pas vraiment agir autrement. ta soeur a le droit de savoir, elle en a aussi besoin. tu n'veux pas la tenir à l'écart plus longtemps, t'as peur qu'elle en souffre ou qu'elle devienne à son tour un dommage collatéral d'une histoire qui a commencé bien des années plus tôt. tu retiens pas ton souffle quand tu frappes à la porte, t'es bourré d'convictions même si tu n'sais pas trop comment tu vas pouvoir aborder tout ça avec elle. quand elle t'ouvre et t'adresse un léger sourire, t'as l'coeur qui se réchauffe un peu. elle t'avait manqué, t'en prends vraiment conscience en ce moment. toutes ces années à te perdre dans cette enquête t'avaient finalement éloigné de ce qui était, fondamentalement, vraiment important.
quand tu lui proposes un verre de vin, elle t'adresse un nouveau sourire en te répondant : (bien sûr, je vais nous chercher ça.) et tu enlèves ton pull, tu te laisses glisser sur le sofa et tu apprécies cet instant un peu irréel. ton retour à la vie, le seul qui soit vraiment important. quand elle réapparaît avec la bouteille et les verres, tu n'peux pas t'empêcher de sourire un peu plus. t'as l'impression de remonter le temps, de la retrouver après tout ce temps. (je suis contente que tu sois revenu.) tu attrapes le verre de vin d'une main qui ne tremble même pas. il t'y manque deux doigts mais face à juliet, tu n'te sens pas menacé et encore moins en danger. t'as pas peur qu'elle le remarque, ni même qu'elle louche un peu. t'es prêt à tout accepter quand elle est là. (d'entre les morts ou depuis notre dernier rendez-vous sur ma tombe ?) tu lui glisses en souriant, levant le verre à tes lèvres après avoir trinqué avec elle.

ça semblait encore surréaliste, quand t'y penses. ton regard qui se pose sur le sien, t'as de la peine à croire qu'il se trouve ici, juste devant toi. t'as de la peine à croire encore que ton frère est en fait en vie. tu repenses à son enterrement, à toutes les larmes que tu as pu pleuré depuis sa "mort". c'était un choc de le savoir en vie. un choc de réaliser que tu avais pleuré toutes ces larmes pour rien du tout. parce qu'ange était toujours là, quelque part. dans un sens, tu l'avais senti. tu ne t'imaginais tout de même pas qu'il soit encore en vie, mais tu savais que quelque chose ne tournait pas rond au sujet de la mort de ton frère. les enquêtes que tu as pu mener de ton côté t'avaient occupé l'esprit. tes parents pensaient que tu étais devenue folle, à force. mais ce n'était pas le cas. tu en avais aujourd'hui la confirmation. tu prenais deux verres et une bouteille de vin, histoire de vous détendre un peu avant la discussion difficile qui va suivre. tu le sais. tu veux obtenir plus de réponses aujourd'hui et tu espères que ton frère acceptera de te les donner. après tout ce qu'il s'est passé, tu penses qu'il te doit bien ça. dans le salon, tu poses ton regard sur le sien alors que vous trinquer. t'as le sourire aux lèvres, tout comme lui. ça te fait réellement plaisir de l'avoir à tes côtés. et tu ne manques pas de relever le fait que tu es contente qu'il soit revenu. d'entre les morts ou depuis notre dernier rendez-vous sur ma tombe ? tu ne peux t'empêcher de rire face à cette question. les deux. évidemment. tu lances avec un large sourire, reposant ton verre de vin sur la table basse. si tu savais comme tu m'as manqué pendant tout ce temps. j'avais personne à qui raconter mes aventures. tu dis avec un nouveau petit rire. ange a toujours été ton confident. celui à qui tu as toujours tout raconté, sans la moindre hésitation.

ça te fait bizarre d'être là, dans son intérieur. de pouvoir t'y installer et de pouvoir profiter de sa présence. c'est comme rentrer à la maison, après avoir passé de longs hivers à chercher ta route et ton chemin. personne ne pourrait comprendre ce qu'il se passe en toi quand tu l'entends revenir dans la pièce et pourtant, t'as l'corps tout entier qui se réchauffe. elle est là, une bouteille à la main et deux verres. cette scène pourrait paraître banale mais elle ne l'est pas. c'est ton retour que vous fêtez, ce soir. mais pas un retour ordinaire, non. une renaissance au sens le plus propre du terme. alors oui, t'es heureux, presque conquis. tu pourrais tout lui donner, à Juliet. elle n'a jamais été que la plus grande et belle de tes causes. t'es ravi d'être assis ici, de pouvoir plaisanter un peu.
- les deux. évidemment. et son sourire traduit tout ce qu'elle ressent, elle aussi. tes opales se noient dans les siennes alors que tu portes le verre à tes lèvres. tu peux pas t'empêcher de la trouver différente, plus adulte et femme que lorsque tu l'avais abandonnée. et même si tu te sens encore un peu coupable, elle a vite fait de te mettre à l'aise, Juliet. si tu savais comme tu m'as manqué pendant tout ce temps. j'avais personne à qui raconter mes aventures. tu souris en coin, reposant le verre sur la table. tu l'observes un instant. sûrement un instant de trop. perdu dans tes réflexions, à comparer l'image que t'avais gardé d'elle et celle qu'elle t'offre aujourd'hui.
- alors raconte moi. tu lui dis. après tout, vous avez toute la nuit pour parler de ce qui fâche. en attendant, tu veux tout savoir. ce qu'elle a fait et ce qu'elle a construit alors que tu faisais semblant d'être mot. je veux tout savoir dans les moindres détails. comprendre chaque motivation qui s'est cachée derrière chaque décision que tu as prise. j'ai plus de trois ans à rattraper. tu plaisantes un peu mais ça t'crève le coeur de savoir qu'il vous manquera toujours ça.. trente-six mois, ou plus. quelque chose qui n'se rattrapera jamais.

un verre de vin à la main, ton regard posé sur le sien. t'as parfois l'impression d'être entrain de rêver. tout ce qu'il se passe à cet instant précis te semble tout à fait impossible. et pourtant, c'est bien la vérité. tu peux à nouveau profiter de moment en compagnie de ton frère. il t'as manqué, c'est évident. il y a pas une journée qui soit passée sans que tu ne penses à lui. tu ne comptes pas non plus le nombre de fois où tu t'es rendue sur sa tombe pour lui raconter tes petites histoires. comme tu as toujours eu l'habitude de le faire. forcément, savoir qu'aujourd'hui tu allais pouvoir à nouveau lui parler comme vous aviez l'habitude de le faire, le prendre dans tes bras, le voir sourire, rire, l'entendre te parler à son tour, c'était quelque chose d'impensable. même si tu le savais depuis quelques jours maintenant, ça restait difficile à croire et il te faudrait sans doute du temps pour réaliser qu'ange est bel et bien de retour. alors raconte moi. il te lance sans hésiter, le sourire aux lèvres. ange avait raté tellement de choses sur ta vie, c'était évident. et tu te réjouissais de pouvoir lui raconter les moindres détails. mais tu savais aussi que tu devras finalement parler de sin et pour cela les choses se corseront. je veux tout savoir dans les moindres détails. comprendre chaque motivation qui s'est cachée derrière chaque décision que tu as prise. j'ai plus de trois ans à rattraper. tu ris légèrement avant de répondre, il ne faut pas non plus t'attendre à des choses extraordinaires. tu minimises un peu la situation, tu ne veux pas non plus qu'ange pense que tu as accomplis des miracles, ce n'est clairement pas le cas. tout d'abord, j'ai fini par t'écouter.. il a fallu que je te croie mort pour le faire, je sais bien, mais j'ai ouvert mon bar. il s'appelle le rendez-vous et il fonctionne très bien. les flics, les pompiers, les médecins y viennent avec plaisir. et tout ça c'est grâce à toi. tu sais qu'il t'a poussé pendant tellement longtemps à faire ça. ange savait que ça fonctionnerait et aujourd'hui tu pouvais lui confirmer tout cela.

c'est agréable. se sentir vivant, à nouveau. comme autrefois. en sa compagnie, comme si rien n'avait changé. pourtant, trois ans vous séparent de ceux que vous étiez autrefois. et tu t'en veux, parfois quand tu fermes les yeux avant de t'endormir. tu t'en veux de leur avoir imposé tout ça, de leur avoir fait croire que tu étais mort et de les avoir obligé à vivre avec ce sentiment horrible de culpabilité qui a dû serrer leur corps depuis tout ce temps. alors oui, t'es heureux d'être de retour, mais quelque fois, tu te demandes si ça n'serait pas plus simple pour eux de te croire encore mort, loin, disparu.. au moins, elles ne souffriraient pas d'avoir perdu trois ans sans toi et d'avoir pleuré à ce point ta disparition pour rien. évidemment, Juliet ne te le fait pas ressentir, contrairement à Leah qui pourrait te faire des reproches. Juliet te donne même l'impression de ne rien te reprocher, comme si elle jugeait naturel que tu sois revenu après toutes ces années et comme si rien n'avait plus d'importance que ce qui vous a toujours lié. tu lui en es reconnaissant, évidemment.
- il ne faut pas non plus t'attendre à des choses extraordinaires. elle te dit en souriant. peu importe, en vrai. tu veux tout savoir, et tu n'laisseras pas le temps vous manquer. trois ans, c'est long. il s'en est sûrement passé des choses pour elle. tout d'abord, j'ai fini par t'écouter.. il a fallu que je te croie mort pour le faire, je sais bien, mais j'ai ouvert mon bar. il s'appelle le rendez-vous et il fonctionne très bien. les flics, les pompiers, les médecins y viennent avec plaisir. et tout ça c'est grâce à toi. elle te dit, fièrement. tu souris, toi aussi. fier, bien sûr. de savoir qu'elle a pris ce risque.. enfin. elle en parlait depuis longtemps, elle n'avait jamais osé franchir le pas. tu l'encourageais, autrefois. mais aujourd'hui, c'est chose faite.
- je suis fier de toi Juliet. tu lui dis sans rougir, sans cesser de sourire. je savais que l'idée fonctionnerait. j'étais sûr que tu pouvais y arriver. je suis d'autant plus fier que tu aies réalisé tout ça seule.. vraiment. même si tu t'en veux, bien sûr. d'avoir manqué les étapes cruciales de ce beau projet. tu marques une pause, sans te départir de ton sourire. j'ai envie de venir voir ce que ça donne. tu lui dis en riant. j'ai envie de voir ce que tu as fait. oui, vraiment.